Comme un goût d’aventure dans les trains indiens…

Cela fait bien déjà une heure ou deux que nous attendons patiemment dans la gare de cette petite ville perdue du Sud de l’Inde. Nous ne comprenons rien aux annonces en Malayalam, cette langue étrange à l’alphabet tout en rondeur.

Notre train tout d’abord annoncé pour 14 heures est finalement reporté à 16h15, puis à 17h14 puis à nouveau à 16h03.

Nous alternons entre la salle d’attente bondée et le quai et tentons de nous concentrer sur les bouquins gardés à portée de mains.

Jean-Yves essaie de comprendre les indications et de glaner quelques informations. Dans la salle d’attente, une foule bigarrée patiente tranquillement. Elle va du voyageur qui semble égaré ici depuis les années 70 à l’homme d’affaire happé en permanence par les notifications de son ordinateur portable, en passant par des femmes aux saris époustouflants de couleurs, puis par des hommes aux béquilles usées par le temps et enfin par les enfants aux yeux noirs qui dévorent leur visage sous les traits du khôl.

Impossible finalement de se concentrer sur nos livres tant l’activité autour de nous est intense. Un wagon attire notre regard. Paré de jaune, il est réservé aux personnes aux habiletés différentes, une autre façon de qualifier le handicap !

Tandis que certains piquent un petit roupillon affalés sur un siège, d’autres sont allongés et dorment tout leur saoul sur le sol de la salle d’attente. D’autres encore observent l’avancée des travaux à l’extérieur. Au bout du quai, nous découvrons qu’il y a une sorte de cantine.

Nous décidons d’aller nous y restaurer de quelques samossas bien épicés, d’une assiette de riz, de 2 boissons gazeuses pour assurer nos arrières gastriques et de deux thés massala chaï. Le paradis finalement ! Assis face à face au fond de la salle immense, nous nous sommes inconsciemment installés juste à côté des grilles qui font office de fenêtre et procurent un semblant de fraîcheur.

Dehors, il doit faire environ 40° bien que nous soyons en plein cœur de décembre.

Sur les rails, une jeune femme en kurta rose saumon et dhoti marron dirige les opérations à l’abri d’une ombrelle grise doublée de rose.

Autour d’elle, de jeunes hommes s’activent à réparer les rails, à remettre le ballast, sous sa conduite. Il s’agit justement de la voie depuis laquelle notre train doit partir. Aïe, aïe, aïe…

Nous sortons de la cantine après nous être bien régalés des mets d’une grande simplicité à un tarif défiant toute concurrence. Nous espérons maintenant bénéficier du courant d’air apporté par le passage d’un train en gare.

Ces trains sans fin qui traverse l’immensité de l’Inde transportant à leur bord les milliers de voyageurs habitués à la ponctualité infaillible des trains indiens.

Ils traversent plaines et ponts à leur rythme comme un long serpent multicolore qui se déplace en prenant tout son temps.

Sur les rails, les travaux vont bon train. Sur les quais la foule s’étire maintenant et chacun y va de son commentaire.

Nous échangeons quelques mots avec un vieux couple très âgé qui nous explique que notre train est justement annoncé sur l’autre quai.

Le temps de remercier pour les indications, de rassembler nos affaires un peu éparses, il faut vite monter les grands escaliers au-dessus des voies. Franchir la passerelle tandis que le train entre en gare et se faufile sous nos pas.

Vite, vite, redescendre les grands escaliers et chercher nos places parmi la multitude de voitures du bleu turquoise au rouge mat en passant par le jaune vif. Tout un code couleur dans lequel il faut se repérer au plus vite.

Nous nous repérons tant bien que mal et finissons par grimper à bord de la bonne voiture dans laquelle nous trouvons rapidement nos places. Nous nous installons, heureux de partir enfin vers Cochin au rythme bluffant de cette incroyable ponctualité indienne à nulle autre pareille. Mais ici personne ne s’affole, on attend sagement en méditant, en parcourant les lignes d’un journal ou en devisant avec ses voisins.

Comme la plupart du temps, dans les trains indiens, il fait vite trop chaud ou trop froid. Aujourd’hui, on dirait assez vite trop froid, la clim étant poussée à son maximum. Je cherche mon écharpe et découvre que dans l’affolement je l’ai sans doute égarée sur le quai. C’est sans compter sur l’impressionnante organisation indienne. Une organisation qui nous dépasse et à laquelle nous ne comprendrons sans doute jamais rien. Magie de l’Inde. Un contrôleur se présente avec ses listings informatiques interminables. Il me demande mon billet et mon passeport, fouille dans sa mallette et me tend mon écharpe.

Dégustant une tasse de thé livrée par un des nombreux chaï wallah qui grimpent à bord des trains à chaque arrêt avec des mets tout chauds et des thés servis à volonté, nous nous réjouissons de cette belle aventure. Magie de l’Inde qui nous trouble, nous émeut, nous surprend et qui nous rend profondément heureux et patients. Et qu’importe l’heure du départ et celle de l’arrivée, l’essentiel n’est-il pas ailleurs ?

Par Nathalie

4 commentaires Ajouter un commentaire

  1. Avatar de Fabienne Friederich Dominique Berlet Fabienne Friederich Dominique Berlet dit :

    merci pour ce voyage , nous qui sommes coincés par la pandémie .

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  2. Avatar de Agnès BREVIERE Agnès BREVIERE dit :

    Merci de ce partage. J’avais adoré les voyages en train lors de mon séjour en Inde en 2019. Une véritable aventure à chaque fois renouvelée. vous décrivez très bien cette impression d’être perdu, de ne rien comprendre et finalement de trouver son train comme par miracle. L’Inde est magique…

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  3. Avatar de Caro Caro dit :

    Superbes photos et récit d un périple keralais que j ai découvert l année dernière et suis tombée sous le charme ! Merci de nous avoir fait voyager !

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  4. Avatar de Amal Amal dit :

    C’est encore mieux avec les photos,
    Merci,

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