English version : https://nathjy.travel.blog/2020/07/09/new-marauding-with-wanted-in-a-deconfined-paris/

Il est à peine huit heures, je m’éveille et entends au dehors les gouttes qui frappent le pavé de la rue. Il a plu une bonne partie de la nuit, c’est mon anniversaire et j’ai envie de lézarder sous la couette. On est bien au chaud, c’est douillet. Et pourtant, je repense à toutes les personnes rencontrées hier au cours de la maraude avec la sympathique équipe de Wanted.
Comme tous les vendredis, des bénévoles se sont déchaînés avec amour et passion en cuisine. Coup de chapeau pour ces cuisini(ères)ers que vous ne verrez sans doute jamais sur vos écrans, ni dans les concours culinaires ni dans une quelconque émission de « Top Chef ». Ceci alors qu’ils en méritent tous le titre ! Un grand bravo à tous ceux qui ont travaillé dans l’ombre pour préparer les quelques 1006 barquettes de couscous maison, accompagnées de bouteilles d’eau et agrémentées de délicieuses bouchées orientales cuisinées de main de maître.

Il est 18h45, c’est l’heure du RDV devant le 74 avenue Denfert Rochereau. Nous sommes aux Grands –Voisins et une cinquantaine de bénévoles s’activent dans la Cour Robin. Il est temps de charger les coffres des voitures.

Comme à chaque fois, nous sommes chaleureusement accueillis et on nous indique tout de suite qui seront nos coéquipières de la soirée. Ici pas de prise de tête, tout est bien organisé : masques, gants, gel hydro-alcoolique sont mis à disposition et on ne mégote pas avec le bien-être des bénéficiaires et des bénévoles !

Sabrina, Sachi, Marie… veillent avec discrétion au bon déroulement des opérations et assurent le départ régulier des véhicules.
C’est le moment pour nous d’embarquer avec Nadia et Sachi en direction de la Gare de Lyon.
Bref passage devant la Gare d’Austerlitz où une autre équipe assure une distribution de repas servis avec café. Des bénéficiaires affluent de tous les horizons. Ils comptent sur la présence rassurante de ces bénévoles qui viennent à leur rencontre semaine après semaine. Il existe là de belles rencontres humaines…
Nous filons maintenant vers la Gare de Lyon et effectuons, avant de nous lancer, un dernier point avec l’équipe en charge des tunnels sous la gare. Ils iront quant à eux à la rencontre des hommes et des femmes qui ont trouvé un ultime refuge dans ces tunnels souterrains.

Notre petite équipe part à la rencontre des oubliés du monde qui sont installés sur le parvis supérieur de la gare. Nous découvrons la logistique mise en place, dans le cadre du plan prévention du Coronavirus, pour gérer les files d’attente des taxis. Chacun dans son rond marqué au sol, chacun dans sa bulle. Le parvis est pratiquement désert, c’est surprenant pour un vendredi soir. Il y a très peu de voyageurs. De-ci-delà, nous allons vers les personnes en grande détresse qui dorment à l’abri d’une barrière ou cachées derrière des potiches de plantes. Certains semblent avoir définitivement perdus tout repère et la relation est plus délicate à établir. Ils sont partis dans un autre monde qui nous échappent. D’autres, à contrario, sont avides d’échanges, surtout en cette période de pandémie où tout le monde se tient à distance les uns des autres.
Ce matin, alors qu’il pleut, je repense particulièrement à cette femme avec qui nous avons échangé sous le tunnel qui va en direction de la gare de Bercy. Elle est installée avec dignité, sur les marches qui descendent vers le parking souterrain . Elle a le regard qui pétille, prend soin de ses coups de soleil et semble si lumineuse au milieu de ce tunnel sinistre et à l’atmosphère bien glauque.
Je pense aussi à Titi, qui bien qu’il soit né dans une ville de Province proche de Paris, n’arrive pas refaire sa carte d’identité et qui de ce fait a le sentiment de ne plus exister aux yeux du monde et d’être totalement inconnu de la société.
Il y a aussi tous ceux qui surgissent de nulle part et viennent à notre rencontre tout simplement parce qu’ils ont faim. C’est frappant pour nous qui avons travaillé dans des équipes de lien social. Il est terrifiant de constater, qu’en ces temps-ci, les priorités ne sont plus nécessairement les mêmes. Encore plus frappant quand dans la soirée, vous avez lu un article dans lequel vous avez appris que les 600 plus riches américains ont augmenté leur fortune de 436 milliards de dollar au cours de ces derniers mois.
Encore plus frappant, ce jeune homme qui vient délicatement taper aux carreaux de la voiture, alors que nous sommes stationnés en attendant l’une de nos coéquipières, et qui nous demande si nous n’aurions pas quelque chose à manger car il a faim. Nous avons tout distribué si rapidement qu’ il est temps de rentrer aux Grands Voisins . Il reste pourtant tant de personnes bien cachées à l’abri des regards.

Alors, en ce jour d’anniversaire, j’ai envie de vous dire merci pour tous ces petits gestes qui comme des petites gouttes d’eau accumulées feront de grandes rivières ! C’est mon espoir du jour !
Par Nathalie
Très beau texte, digne d’un papier journalistique 🙂 Il est juste et émouvant! Merci encore 🙂
J’aimeAimé par 1 personne
Merci 😉
J’aimeJ’aime
Quel papier si bien illustré et si bien écrit, tu nous a plongés doucement dans l’affreuse réalité.
Jaime bien aussi le contraste ton lit douillet et le refuge derrière les bacs à plantes de la gare
Continue continue
J’aimeAimé par 1 personne
Merci de tes encouragements 😉
J’aimeAimé par 1 personne
Bravo beau témoignage j au vite envie de rejoindre tes pas Nath j espère que je pourrais sur tours ?je ne sais je n’ ai pas encore trouvé de toit !!
J’aimeAimé par 1 personne
Bravo et merci à toi Nathalie, d’offrir ainsi un espace – et une voix – à ceux qu’on a laissés dans le silence…
J’aimeAimé par 1 personne